Le secteur bancaire prospère – ou survit même – grâce à la fiabilité et au sentiment de confiance qu’il inspire. Les banques suisses en particulier ont depuis longtemps maîtrisé cet art ; et se sont établies comme des institutions éprouvées par le temps. Cet armure de confiance commence cependant à paraître un peu rouillée lorsqu’une banque suisse fait faillite.
Credit Suisse était la deuxième plus grande banque de Suisse, avec plus de cinq cent soixante-dix milliards de dollars d’actifs et trois fois plus de biens en gestion. On la considérait comme trop grande, trop ancienne, trop établie pour faire faillite, pourtant elle s’est effondrée la même semaine que la Silicon Valley Bank. Les effondrements de ce genre sont un problème, mais ils ne sont pas le problème. Le problème découle de la croissance ou plutôt de l’absence de celle-ci. Nous sommes voracement dépendants de la croissance et lorsque nous ne pouvons pas l’obtenir, nous subissons des effets secondaires négatifs.
Et les axes de croissance sont de plus en plus difficile à trouver.
Après la chute du mur de Berlin, l’économie de marché libre est rapidement devenue la norme, dans ce que certains ont appelé le grand doublement. Soudainement, il y avait plus de marchés mondiaux et plus de richesse à partager. Malheureusement, il n’y a plus de pays supplémentaires à trouver et peu de marchés inexploités pour stimuler le PIB mondial. De plus, tout est profondément interconnecté, ce qui ne devient que trop visible lorsque la situation se dégrade
Prenons la Chine, le principal moteur de l’économie mondiale au cours des vingt dernières années. Selon le Wall Street Journal, la Chine a dépensé un Milliard de dollars américains dans son ambitieuse initiative Belt and Road, qui leur a permis de se tailler une place de bienfaiteur s’étendant de l’Asie centrale à l’Amérique latine. Cependant, l’inflation, les taux d’intérêt plus élevés et les pénuries d’approvisionnement ont impacté nombre des économies avec lesquelles ils font affaire, poussant la Chine à resserrer les cordons de la bourse. Le résultat est ce que certains économistes occidentaux appellent la diplomatie de la dette (ou la diplomatie de l’endettement).
Beaucoup de ces mêmes économistes prédisent cela depuis un certain temps, mais il y a des choses que nous ne pouvons pas prédire et pour lesquelles nous sommes mal préparés.
Après une pandémie qui, selon une prévision du FMI, a couté 12,5 Milliards de dollars à l’économie mondiale, survient la première véritable crise énergétique mondiale. Celle-ci a fait voler en éclats l’idée que nous retrouverions une certaine forme de stabilité après la pandémie et que nous nous remettrions à faire de l’argent. Elle a attisé l’inflation, remis en question les engagements en matière de climat et conduit les gouvernements à dépenser des milliards pour tenter d’atténuer l’impact de la hausse des coûts de l’énergie. C’est un fardeau qui affecte de manière disproportionnée les populations les plus pauvres : cinquante-quatre pays ont déjà vu le montant de leur dette augmenter fortement et risquent de se retrouver en défaut de paiement, soit un quart des nations du monde.
Alors, si nous ne pouvons pas nous sortir des problèmes par la croissance, que faire ?
Le département des affaires économiques et sociales des Nations unies a suggéré quatre façons de procéder :
- diversifier les économies
- réduire les inégalités
- améliorer les institutions
- rendre la finance durable.
Peu de gens peuvent contester que les institutions bancaires ont besoin d’être améliorées et que la finance doit être durable. Plus rares encore sont ceux qui peuvent contester qu’il existe des inégalités qu’il est urgent de corriger. La diversification, cependant, pourrait être particulièrement prometteuse. Le Conseil de coopération du Golfe, par exemple, tente de rompre sa dépendance mutuelle à l’égard du pétrole en introduisant pour la première fois la taxe sur la valeur ajoutée. Il est permis de penser que la crise énergétique elle-même accélérera les investissements et stimulera la recherche sur les sources d’énergie renouvelables, qui pourront alors être vendues dans le monde entier, ce qui pourrait déclencher une nouvelle vague de croissance.
Cela nécessitera une réponse globale significative, mais nous connaissons actuellement une crise financière en moyenne tous les dix ans et, inévitablement, d’autres banques feront faillite. Un pansement n’arrêtera pas l’hémorragie, même s’il s’agit d’un pansement de deux milliards de dollars comme le rachat du Crédit suisse par UBS.
Quoi qu’il arrive, essayer quelque chose de nouveau ne ferait pas de mal …